La vitrerie du déambulatoire fut réalisée en plusieurs étapes par le verrier bordelais Gustave-Pierre Dagrant (1839-1915). Les archives du fabricant contiennent plusieurs dessins préparatoires pour cet ensemble, parmi lesquels un grand croquis daté 1896 et incluant les neuf verrières (dont celle de la baie 11, déjà posée par Paul Chalons en 1882). En revanche, elles ne possèdent qu'une seule pièce de correspondance en rapport avec l'une des verrières : une lettre du 2 juillet 1894 dans laquelle Gabrielle de Neurisse de Laluque, donatrice du vitrail de Saint Vincent de Paul (baie 9) et de l'autel qu'il surmonte (réf. IM40004450), décrit au verrier les armoiries familiales à apposer au bas de l’œuvre - la même Mlle de Laluque avait déjà fait appel à Dagrant l'année précédente pour une verrière de l'église Saint-Vincent-de-Xaintes (réf. IM40004389). Les autres verrières sont datées par les millésimes inscrits, quand ils sont lisibles, et par les dessins précités. La baie 3 est ainsi de 1896, ce qui doit être aussi le cas des verrières au décor identique (4, 5 et 6, les deux premières portant un millésime illisible). La verrière de Saint Charles Borromée (baie 7) pose un problème particulier : son croquis préparatoire est daté 1893, mais la verrière elle-même porte un double millésime, 1892 et 1898 (celui-ci, qui est la date de l'exécution, accompagne la signature). Frappée aux armes de Charles Le Quien de La Neufville (1806-1892) et figurant son saint patron, elle constitue un hommage posthume à ce dernier descendant de la famille, disparu précisément en cette année 1892, sans doute en laissant à la fabrique la somme nécessaire à l'exécution de cette verrière. Les deux verrières encadrant l'autel de saint Joseph et dédiées au père nourricier du Christ (baies 4 et 6) furent offertes, comme l'indique une mention de l'inventaire de 1906, par Joséphine de Saunhac-Belcastel (1804-1899). Le donateur des deux verrières dédiées au Sacré-Cœur (baies 1 et 2), aux initiales PM, n'a pu en revanche être identifié. Quant au thème de la Sainte Famille dans l'atelier (baie 6), il avait déjà été traité en 1874 par le même Dagrant pour une verrière du bras sud du transept (réf. IM40004438), preuve supplémentaire du défaut de cohérence dans le programme iconographique de la vitrerie de la cathédrale.
A l'exception de la verrière de Saint Vincent de Paul, dérivée d'un tableau de Nicolas-André Monsiau (Paris, église Saint-Germain-l'Auxerrois), la plupart des cartons reproduisent en tout ou partie des sources gravées allemandes d'inspiration nazaréenne, pour certaines récemment rééditées en recueils (1887) : la figure du Christ dans le Sacré-Cœur consolateur est ainsi empruntée au Jésus bénissant les enfants de Friedrich Overbeck (1789-1869), le Jésus bénissant les enfants est partiellement copié d'après Bernhard Plockhorst (1825-1907) et la Tempête apaisée d'après une composition de Gustav Richter (1823-1884). Presque tous les cartons ont été employés à diverses reprises par Dagrant : ainsi, pour ne citer que quelques exemples, le Jésus et les enfants à Gensac-la-Pallue (16) en 1900, le Saint Vincent de Paul à Donzacq, Hagetmau, Linxe et Orx (40), le Sacré-Cœur consolateur à Carennac (46), le Saint Charles Borromée au Château-d'Oléron (17) en 1896, la Mort de saint Joseph à Bias (47) en 1894 et à Podensac (33) la même année 1896, la Tempête apaisée à Pissos en 1900. La figure de l'infirme du Saint Vincent de Paul réapparaît sur une maquette de verrière du Sacré-Cœur consolateur datée 1901 (mais sans mention de la destination).
Peintre-verrier né à Bordeaux (51, chemin du Sablonnat) le 15 septembre 1839 et mort dans la même ville le 21 septembre 1915 ; fils de Jean Dagrant, plâtrier, et de Jeanne Sallette ; marié à Bordeaux, le 3 octobre 1863, à Jeanne-Eugénie Chartier, sœur de Jean-Georges Chartier, peintre-verrier. Il en eut sept enfants, dont trois peintres-verriers qui lui succédèrent, Maurice (1870-1951), Charles (1876-1938) et Victor (1879-1925), et une fille qui épousa Albert Borel, son principal collaborateur. Né Pierre-Gustave Dagrant, le verrier changea son nom en Gustave-Pierre Dagrand entre 1864 et 1889, avant de reprendre, par jugement du tribunal de première instance de Bordeaux du 19 juillet 1889, son nom d'origine avec la graphie Dagrant. D'abord actif à Bayonne (où ses parents possédaient une propriété), il y fonde un premier atelier en 1864, puis crée en 1873-1874 un second atelier à Bordeaux (7, cours Saint-Jean, actuel cours de la Marne), ville où il s'installe définitivement par la suite.