La vitrerie de Sainte-Eulalie a été installée en plusieurs campagnes par le verrier Gustave-Pierre Dagrand (1839-1915). Les verrières les plus anciennes - qui sont aussi les premières connues de Dagrand dans le département des Landes - suivent de près l'ouverture de son premier atelier à Bayonne (1863). Les trois verrières du chœur datent de 1864, cinq des verrières historiées des collatéraux et celle de la sacristie, de 1865, l'Assomption de la face sud du clocher, de 1866. Ce premier ensemble a été complété tardivement (alors que Dagrand était désormais installé à Bordeaux), par un Baptême du Christ au bout du collatéral nord, daté de 1883, et par les verrières décoratives des deux bas-côtés, dont l'une porte le millésime 1890. Enfin, la verrière nord du porche (actuellement unique, mais qui devait faire pendant à une verrière disparue), ni signée ni datée, mais où on reconnaît le style de Dagrand, est postérieure à 1874, date de la construction du porche. On notera que le verrier, peut-être par souci d'homogénéité avec ses travaux antérieurs, signe "Dagrand" les dernières verrières de 1890, malgré la modification orthographique apportée à son patronyme (remplacement du "d" final par un "t") par jugement du tribunal de Bordeaux le 19 juillet de l'année précédente. Une autre anomalie inexpliquée est, au bas de la verrière 11, la localisation "Bordeaux" accompagnée du millésime 1865, date à laquelle Dagrand travaillait toujours à Bayonne...
La plupart des verrières de 1864-1865 ont été offertes par des membres de la famille Daugreilh (Joseph Félix, mort en 1891, et son frère Pierre Anselme ou Auguste), propriétaires à Pavillon (ou Pabillon) - et futurs donateurs de la troisième cloche de l'église en 1876. Le vitrail de Sainte Eulalie est un don de Théophile Poydenot (1805-1887), propriétaire du château de Prous dans la commune voisine de Montgaillard et donateur du maître-autel de l'église de ce bourg - à noter que son épouse, née Loustaunau, se prénommait Eulalie. Enfin, la verrière du Baptême du Christ , acquise pour 180 francs (registre de comptes de Dagrant), fut offerte en 1883 par Étienne Dehez, de Larroucat, donateur en 1878 d'une autre œuvre de Dagrand à l'église d'Aurice.
Plusieurs des cartons de Dagrand, dont on trouve peut-être ici la première utilisation dans les Landes, ont été remployés à diverses reprises par la suite. Le Salvator mundi a servi à Briscous (Pyrénées-Atlantiques) en 1866. L'effigie de Sainte Eulalie se retrouve en sainte Colombe à... Sainte-Colombe en 1868 (réf. IM40003559) et en sainte Catherine à Préchacq-les-Bains en 1870. Le Saint Pierre est adapté du même modèle que celui utilisé en 1867 à Sarraziet, église où on retrouve le Saint Michel, également employé à Moustey en 1874 (réf. IM40001716) et dérivé d'une gravure (1847) de Dominik Mosler d'après le peintre nazaréen allemand Friedrich Overbeck. La pérennité de certains modèles est démontrée par la réutilisation tardive du Baptême du Christ à Saint-Vincent-de-Xaintes (Dax) en 1893 et de l'Assomption à Gaas en 1869 (réf. IM40001317) et à Pissos en 1900 (réf. IM40001791).
La facture identique des visages et des détails ornementaux, que l'on constate dans toutes ces œuvres précoces de Dagrand, décèle une même main, probablement celle du chef d'atelier lui-même, encore peu secondé à ses débuts. Les cartons, quant à ceux, dérivent certainement de modèles gravés allemands, la principale source d'inspiration du verrier (et de beaucoup de ses confrères) à ce moment de sa carrière. Quelques détails décoratifs, comme les vrilles végétales qui s'enroulent autour des cadres des médaillons figurés, proviennent en revanche du répertoire de Joseph Villiet, le maître de Dagrand lors de sa formation bordelaise.
Peintre-verrier né à Bordeaux (51, chemin du Sablonnat) le 15 septembre 1839 et mort dans la même ville le 21 septembre 1915 ; fils de Jean Dagrant, plâtrier, et de Jeanne Sallette ; marié à Bordeaux, le 3 octobre 1863, à Jeanne-Eugénie Chartier, sœur de Jean-Georges Chartier, peintre-verrier. Il en eut sept enfants, dont trois peintres-verriers qui lui succédèrent, Maurice (1870-1951), Charles (1876-1938) et Victor (1879-1925), et une fille qui épousa Albert Borel, son principal collaborateur. Né Pierre-Gustave Dagrant, le verrier changea son nom en Gustave-Pierre Dagrand entre 1864 et 1889, avant de reprendre, par jugement du tribunal de première instance de Bordeaux du 19 juillet 1889, son nom d'origine avec la graphie Dagrant. D'abord actif à Bayonne (où ses parents possédaient une propriété), il y fonde un premier atelier en 1864, puis crée en 1873-1874 un second atelier à Bordeaux (7, cours Saint-Jean, actuel cours de la Marne), ville où il s'installe définitivement par la suite.