En 1858, quelques mois après le début de ses travaux de décoration dans le chœur de l'église Saint-Jacques récemment achevée, le Montois Louis-Anselme Longa (1809-1869) peignit ce chemin de croix, dont les cadres néogothiques furent probablement sculptés par le Bordelais Bernard Jabouin aîné (1810-1889), auteur à la même époque de la quasi-totalité du mobilier cultuel de l'édifice. Le nouveau via crucis fut érigé le 25 mars 1859 par l'évêque d'Aire Prosper Hiraboure en présence de l'abbé Miqueu, doyen de Tartas et principal artisan de la construction (le diplôme d'érection est conservé à la sacristie).
Comme il le fit pour la plupart de ses peintures religieuses (y compris le cycle de la vie du Christ dans le chœur de Tartas), Longa s'inspire ici de modèles allemands contemporains, en l'occurrence le cycle d'inspiration nazaréenne peint en 1844-1846 pour l'église Sankt Johann Nepomuk de Vienne par le peintre Josef von Führich (Kratzau, Bohême, 1800 - Vienne 1876). La série, gravée par Aloïs Petrak (né à Königsberg en 1811) et éditée à Ratisbonne par G.J. Manz, connut un immense succès, comme en témoignent les innombrables copies repérées dans les églises de toute l'Europe. Le chemin de croix de Tartas reprend onze des compositions gravées, en les adaptant au format horizontal, en substituant un fond d'or aux paysages de l'original et en supprimant quelques personnages secondaires dans les arrière-plans (voir détails dans les "Précisions sur la représentation"). Trois autres stations (les quatrième, douzième et quatorzième) ont, pour une raison inconnue, été écartées de la série tarusate au profit de compositions de Friedrich Overbeck (1769-1869), gravées respectivement par Heinrich Kipp (station IV) et par Friedrich August Ludy (stations XII et XIV). Ces estampes avaient été diffusées en France sept ans plus tôt par le recueil L'Évangile illustré. Quarante compositions de Frédéric Overbeck gravées par les meilleurs artistes de l'Allemagne (édition française A. W. Schulgen, 1851), qui sera en 1865 l'une des deux sources de modèles de Longa pour son décor mural du chœur de Tartas.
Longa avait déjà reproduit le chemin de croix de Führich en 1857 pour l'église de la Madeleine à Mont-de-Marsan (et peut-être pour l'église de Laballe à Parleboscq la même année, réf. IM40003424). La série servit aussi de modèle à des productions semi-industrielles comme celles des maisons parisiennes Biais ou Bouasse-Lebel (voir les exemplaires de Saugnac-et-Cambran, Montfort-en-Chalosse ou Souprosse, à proximité de Tartas).
Le chemin de croix de Tartas est mentionné sous le n° 8 dans l'inventaire de février 1906 ("Chemin de croix, 14 tableaux, peinture sur bois, revendiqués par Mme N. Thomazo propriétaire à Tartas, encadrement en bois, grands et soignés, fixés au mur par des pattes en fer"). La personne qui le revendiqua à cette occasion est certainement Anne Marie Nelly Dupont, épouse en 1874 du docteur en médecine Jean-Hector Thomazo (1834-1909), fils cadet de Jean Thomazo (maire de Tartas à l'époque de la construction de l'église Saint-Jacques). Les donateurs du chemin de croix de Longa, plutôt que Jean Thomazo, furent donc probablement, comme le suggère l'abbé Dominique Bop (comm. écrite, janvier 2020), les parents de Nelly Thomazo : Pierre Paul Théogène Dupont (Tartas, 28 février 1805 - Tartas, 16 septembre 1891), juge de paix à Tartas et riche propriétaire terrien, et son épouse Marie-Céline Malichecq (Lüe, 31 juillet 1823 - Tartas, 9 juillet 1885).
Peintre né à Mont-de-Marsan le 4 avril 1809 et mort dans la même ville le 13 décembre 1869 ; fils cadet de l'orfèvre Jacques Longa (1769-1822) et petit-fils par sa mère de l'orfèvre montois Joseph Lacère (1731-1810) ; frère puiné de l'orfèvre-bijoutier Jean-Baptiste Longa (1797-1861). Élève de Paul Delaroche à l'École des beaux-arts de Paris, puis réinstallé en 1848 à Mont-de-Marsan, où il exerça les fonctions de professeur de dessin au collège, puis au lycée impérial à partir de 1866. Sur les Longa, voir : ABBATE Simone, Louis-Anselme Longa, 2008.